La littérature sous caféine


mercredi 28 juin 2017

Ballard = Baudelaire + Sacher-Masoch

Le « Crash » de Ballard (1973, adapté au cinéma par Cronenberg en 1996) me fait vraiment penser à un mélange de Baudelaire pour la sexualité mortifère sur fond d’angoisse moderniste et de Sacher-Masoch pour la peinture inédite d’une déviation sexuelle singulière. On ne peut pas dire que cette évocation d’une très improbable jouissance provoquée par les accidents de voiture soit séduisante, mais elle fait selon moi de ce livre un vrai chef-d’œuvre en paraissant résumer de quelques formules foudroyantes quelques-unes des réalités obsessionnelles du 20ème siècle.

mardi 20 juin 2017

Hitchcock les cloue tous au poteau !

Bilan de la deuxième saison de mon ciné-club en prépa : après calcul du taux de satisfaction des étudiants, le Psychose d’Hitchcock emporte haut la main la mise face à des concurrents pourtant corsés, tous excellents dans leur domaine : le Scarface et le Carrie de De Palma, le Quai des Brumes de Carné ou le Trainspotting de Boyle. Amusant comme l’ancêtre lointain des slashers qui ont aujourd’hui envahi nos écrans continue à séduire, en dépit du côté dépassé, presque archaïque, de la scène mythique du meurtre sous la douche. Amusant aussi de se rappeler que l’année dernière, c’était également un film construit autour d’une agression dans une salle de bain qui avait remporté les suffrages, l’indémodable Shining de Kubrick, d’ailleurs grand champion des deux années écoulées.

lundi 12 juin 2017

Edouard Philippe et la beauté des femmes

Il y a quelques années, j’animais un atelier d’écriture sur le campus havrais de Sciences-Po. Edouard Philippe venait d’être investi comme maire et nous avons été présentés. Il m’a dédicacé son deuxième thriller, « Dans l’ombre », et je lui ai dédicacé mon « Suicide Girls » (Léo Scheer). S’est-il dit en découvrant ce petit roman noir, très noir, qu’il avait eu raison de préférer à la vie littéraire l’univers autrement plus pragmatique de la politique ?

Quelques semaines plus tard, je l’ai invité à intervenir devant mes étudiants et il m’a gentiment rendu visite. Pendant une heure il nous a parlé de ces deux activités qu’il menait de front. Et, au terme de la séance, il n’a pas hésité à flirter avec la provocation en répondant avec malice à la question « Quelle est selon vous la principale qualité d’une femme ? » par un elliptique : « La beauté ». Après qu’il a quitté la salle, plusieurs étudiantes en pâmoison ont avoué l’avoir trouvé singulièrement charismatique – sans doute n’osaient-elles pas dire devant leurs camarades : « séduisant ». Manifestement, sa posture d’homme d’action faisait un effet renversant. Et, pour la seconde fois, il a dû préférer les arcanes de la vie politique à celles de l’écriture.