La littérature sous caféine


jeudi 2 mai 2013

Le flirt du thriller et de l'autofiction (Mathieu Simonet: Marc Beltra, roman autour d'une disparition)



L'autofiction (s'il est encore possible d'utiliser ce terme), dont l'une des définitions pourrait être "autobiographie réfléchissant à sa propre forme", relève, bien souvent, de la forme courte : récits épurés d'Annie Ernaux, livres éclairs de Christine Angot, chapitres brefs de Hervé Guibert.

Mathieu Simonet, dans Marc Beltra, roman autour d'une disparition, choisit la succession de courts paragraphes séparés par des blancs, comme autant de flashs cherchant à saisir le mystère même de la disparition d'un jeune homme, Marc Beltra, dans les forêts d'Amazonie, voilà plus de dix ans.

Simultanément, nous suivons le travail d'avocat de Mathieu Simonet, sa correspondance avec plusieurs proches de Marc, les impasses de l'enquête... Les temps se télescopent, les genres et les lieux, pour le plus grand plaisir du lecteur qui, happé par cette histoire envoûtante, ressent une jouissance coupable : ce véritable puzzle littéraire a tout du thriller.

L'émotion naît de la justesse du trait autant que des blancs, qui paraissent ronger le texte. Littérature minimaliste et pourtant puissante. On a l'impression d'un sismographe de l'intime. "Roman autour d'une disparition": roman de l'apparition d'un souffle, d'un mystère.

Trois questions à l'auteur.

1) Quel bilan tires-tu de l’écriture et de la publication de ce livre ?

Ce livre m’a permis de me réapproprier ce dossier. L’affaire Marc Beltra, que je connaissais depuis des années en tant qu’avocat, est apparue sous un angle nouveau. Tous les avocats devraient écrire le roman de certaines affaires. La littérature est un moyen de compréhension (et pas simplement un outil esthétique). C’est important de le souligner car, sur un plan juridique, la pertinence pour un écrivain de traiter l’actualité, par le prisme de l’écriture, est régulièrement remise en cause (en gros, les tribunaux estiment que les écrivains ont une légitimité moins évidente que celle des journalistes, pour décrypter le réel). Par ailleurs, la publication de ce livre a eu des répercussions, que je n’anticipais pas, sur les proches de Marc, notamment sur Françoise (sa mère). Ce livre n’est donc pas simplement un objet avec des feuilles, mais aussi une pierre symbolique qui me dépasse, avec des pouvoirs presque magiques (tel est le cas de tous les livres sans doute, mais avec celui-ci, cela m’apparaît de manière particulièrement palpable).

2) avais tu conscience, en l’écrivant, de son flirt avec le genre du thriller ?

Oui. Dès le début, j’avais en tête qu’un des fils rouges du livre serait construit sur la mécanique de l’émission Faites entrez l’accusé (cette émission a eu une influence souterraine dans le rythme de mon écriture : lorsque j’ai monté ce livre - en coupant les paragraphes, en les déplaçant, en les lisant à haute voix, comme un monteur qui visionnerait des rushs -, j’avais en tête plusieurs sources, notamment, et de manière très précise, la dynamique de cette émission).

3) as tu envie de t’essayer au roman, ou, disons, a une forme beaucoup plus romanesque de roman ?

Non. Le romanesque ne m’intéresse pas a priori. En revanche, j’ai envie de faire des expérimentations. L’écriture, pour moi, est un laboratoire du réel. Il n’est pas exclu qu’une de ces expérimentations soit un jour construit autour de la notion de « romanesque ». Mais si je le fais, cela sera comme un enfant qui démonte un jouet ; je serais face à l’outil romanesque, je me confronterais à ses règles, j’essayerais de comprendre ce que d’autres écrivains y font (pourquoi sont-ils dans cette ville ? que cherchent-ils dans la fiction ?) Je ne sais pas si je testerai réellement cette piste. C’est possible. Pour moi, ce serait comme faire l’amour avec un sexe auquel on n’est pas habitué.

mercredi 6 mars 2013

Entretien express - et néanmoins décoiffant - avec Marc Molk pour "La disparition du monde réel" (Buchet-Chastel)



(Photo: copyright Isabelle Rozenbaum)

Des couples qui se font et se défont dans un mas provençal… Sur cette trame classique (c’est presque un genre en soi, le roman-de-familles-qui-se-retrouvent-dans-une-maison-de-vacances), Marc Molk brode une savoureuse fiction construite par scénettes et courtes digressions. La deuxième personne, le présent de narration accentuent le côté pétillant d’un texte dont la légèreté de forme cache cependant une surprenante amertume : cette Disparition du monde réel (Buchet-Chastel, mars 2013) ressemble furieusement à une disparition de toute illusion sur le monde réel.

Le narrateur – faut-il parler de narrateur quand il s’adresse à vous comme si vous étiez le personnage ? – souffre du spectacle de ces amours qui se délitent à l’aube de la quarantaine... Mais peut-être, aussi et surtout, de l'époque dans son ensemble, une époque marquée par la nostalgie, par une sexualité désenchantée, par toutes ces carrières artistiques avortées, par l’angoisse de ces femmes qui aimeraient devenir mères sans y parvenir…

En fin de compte, Marc Molk dresse le portrait d’une génération singulière, jouissant d’un indéniable confort matériel mais minée par la perte – irréversible ? – d’un contact simple et serein avec le monde.

Dans ce crépuscule, il y a cependant l’humour. Et nous avons droit à quelques paragraphes d’anthologie, de courts passages où s’exprime tout le grotesque d’une époque, toute la folie des contemporains - folie proprement libératrice.

J’aime beaucoup cette phrase, par exemple :

« Vous aimeriez la voir manger salement un plat très gluant accroupie nue dans les douches du vestiaire hommes d’un gymnase soviétique abandonné. » (Page 45)

Quant à ce passage, il vaut son pesant de cacahouètes :

« Vous êtes tous les deux conscients de passer à une étape qui sera essentiellement symbolique. L’odeur du latex, la difficulté de la pose, le serrement ressenti sur le sexe qui par empaquetage tue toute finesse de pression, la laideur de la bite qui ressemble alors à du flétan surgelé, tout dans le préservatif dissuade du plaisir. Mais vous n’êtes pas des inconscients, vous ne voulez pas qu’elle pense cela de vous, et il faut bien au moins une pénétration pour être plus l’un pour l’autre que deux personnes qui se plaisent. »

Trois questions à l'auteur.

1) On croit reconnaître dans ton roman certains de tes proches. D'où cette question, à la fois indiscrète et illégitime, car je ne devrais pas chercher à débrouiller le vrai du faux en littérature : Dans quelle proportion ce texte parle-t-il de toi ?

Ni indiscrète ni illégitime, je ne comprends pas ta question. Tu es rompu à la théorie littéraire, aux questions d’autorarité ou de distance avec les faits, moi aussi... mais au final, il y a des constats simples à faire. Le principal est sans doute que le réel n’existe pas, ou bien qu'il intègre nos lubies, nos fantasmes, bref tout l’imaginaire qu’il suscite et qui se redéverse en lui pour s'y rafraîchir avant une toute nouvelle ubris. Alors je botte en touche, je fais semblant de ne pas comprendre ta question, histoire d’éviter d’y répondre précisément, avec un pourcentage que je pourrais fixer, en fait. Mais cette parade a du sens. Mon roman décrit justement ”la disparition du monde réel” au coeur d’une subjectivité mélancolique. La retraite en soi, les répercussions exagérées d’événements mineurs sur la psychologie hypertrophiée du narrateur, finissant par créer un monde invisible, en creux, grossissant symétriquement au détriment du monde-qui-est-là-pour-tous, tangible, littéralement siphonné de sa sève par cette "vie rêvée". Qu'importe ce qui s'est réellement passé, qui est qui, qui se reconnaît, puisque tout ce qui est raconté s'est passé quelque part, dans ma tête au minimum. D'ailleurs maintenant cette sauce cervelleuse est imprimée, sur les tables des librairies, elle a rejoint le monde officiel pour de vrai. Je te ferai des confidences un soir quand on aura bien mangé avec des amis et qu'ils nous feront un peu chier. Au coin de la table on jouera à la part des choses, mais ici, publiquement, je ne lâcherai rien.

2) Pourrais-tu me parler de ce ton désabusé, du véritable désenchantement qui me semblent imprégner ce texte ?

Le ton, véritable enjeu littéraire s'il en est. Je n'ai pas fait exprès mais j'ai voulu qu'il s'installe celui-ci, quitte à lasser. Je crois presque plus au ton qu'au style. C'est le ton qui inspire. Il ne s'agit pas de mon ton mais du ton de ce livre. Je caquette là mais j'ai peur d'avoir foiré des trucs. Je veux dire que je ne suis sûr de rien, je veux le dire avant de continuer à essayer de te répondre, parce que je me relis et qu'on dirait le résumé des actes du dernier Cerisy : "Ceci c'est cela, le contraire du truc, c'est évidemment la racine du bidule inverse, voilà, c'est Barthes qui l'a dit, etc".
Le ton c'est le ton de "la voix du dedans" dont parle Léo Ferré dans "Vingt ans", cet étourdissant chef-d'oeuvre (Quand il la chante à Bobino en 1969. Le studio ce n'était vraiment pas bon pour Ferré, ça le rendait overlyrique sans raison). La difficulté c'est de faire la distinction entre le ton de l'humeur, du moment, qui te fait écrire plusieurs pages lestes ou quasi-gothiques, et le ton de "l'époque personnelle" à laquelle tu écris, ton époque à toi. Là pendant plusieurs mois, parfois plusieurs années, tu gardes un ton. Tu ne le choisis pas mais il est là, il faut attendre qu'il s'en aille s'il ne te plaît pas. Il y a des contradictions dans ce que je dis mais débrouille-t-en, débrouillez-vous-en. Ah oui ! Unifier le texte, le retravailler, le polir, l'accorder comme on accorde un piano, c'est un risque toujours, celui de la moncordie (qui rime avec monotonie). Mais sans courir ce risque, comment atteindre à une atmosphère, un état de conscience, de soi et du lecteur, particulier ? Tout est dans la balance des graves.

3) Au tout début du roman, tu évoques, sans y revenir par la suite, la lumière d'une "ancienne France d'essence joyeuse", appelée à disparaître... Qu'entends-tu par là exactement ?

La France c'est fini apparemment. C'est vraiment la fin des haricots. Obélix prend la nationalité russe, les enfants de nos riches font leurs études à Harvard, tous. Bernard Arnault se barre en deux mois avec LVMH en Belgique. Personne ne bouge. Moi j'ai de la salive dans la bouche en permanence parce que ma mère m'a expliqué qu'il était grossier de cracher, sinon je cracherai tout le temps et sur beaucoup de monde. Je me souviens de ma grand-mère, elle était provençale, et cela me fait une peine immense. Heureusement elle est morte depuis longtemps. Si elle voyait "la côte d'azur", toute sa région, elle hurlerait en courant les yeux écarquillés sous les pylônes électriques, les énormes boîtes de nuit façon bunkers en béton, les ronds-points mafieux tous les cinq mètres, elle hurlerait. Nous nous n'avons même plus l'idée, je ne dis pas la force mais l'idée de pleurer. Tout le monde se shoote pour oublier, se barre en Australie ou en Thaïlande. "Les pauvres" font croire qu'ils restent mais ils sont partis dans leur tête depuis longtemps. Moi je connais des gens qui travestissent la misère en décroissance dans un acte de résistance mentale supérieur. J'en connais plein. Je n'aspire qu'au sang, je reste car j'ai tellement d'ancêtres qui ont espéré la France qu'ils me renieraient si je la quittais. Alors j'attends, j'attends et j'espère l'explosion de violence, la manifestation du génie français de la guerre civile. Et j'écris mes nostalgies, des fois que ça plante des graines colériques dans quelques têtes.

mardi 16 octobre 2012

Entretien express avec Philippe Jaenada pour La femme et l'ours



J’ai du mal à trouver des livres drôles, sans tomber dans l’humour poissard ou futile. C’est chose faite avec le dernier roman de Philippe Jaenada, La femme et l’ours (Grasset, 2011), que je m’étais promis de lire en découvrant le titre. Et je me suis régalé...

Dans le chapitre d’ouverture, je trouve cet excellent portrait d’un pilier de bar, Jésus. En grand fan de littérature punk (Kathy Acker, Wojnarowicz…) et en praticien d’une certaine littérature de la déglingue, je ne pouvais que tomber sous le charme de ce genre de page :

« Il parlait souvent de la mort, qu’il estimait proche, inéluctable ou souhaitable selon les jours et les moments desdits jours (souhaitable surtout le matin), et ne vivait plus que pour deux choses : la bière et les filles. La bière, ça allait, mais les filles, des clous. Il ne pouvait rien faire d’autre que de les regarder passer, légères, jambes, seins, cul, cheveux, distantes, sur le trottoir devant le bar, sur le passage piéton, les clous, il écarquillait les yeux, bougeait spasmodiquement les bras et jurait entre ses quelques dents : elles étaient là, proches, magnifiques et moelleuses, et il ne pouvait même pas leur toucher une oreille.

La dernière avec qui il avait eu la chance de coucher s’appelait Myriam, c’était la femme de sa vie. Elle n’était plus très jeune ni très belle, elle avait une bonne trentaine de kilos en trop, elle était irascible et malade, elle boitait, criait souvent, portait une perruque – mais il l’aimait. Ils se disputaient sans cesse, à toute heure, pour des choses aussi graves qu’une cigarette, un fond de bière ou une part de pizza, ils semblaient se haïr mais ne pouvaient se passer l’un de l’autre. Un jour de printemps, elle avait un peu plus de quarante ans, elle est partie se refaire une santé dans les Alpes (ce n’était pas du luxe), où elle est morte
. »

L’intrigue relativement épurée (le narrateur est un homme usé, écrivain au succès relatif, lassé de sa vie de famille, partant courir les routes pour retrouver la trace d’une conquête) donne prétexte à de nombreux épisodes picaresques. Jaenada fait preuve d’une certaine maestria dans l’humour pince sans rire et l’amertume polie. Son sens de la formule fait mouche dans les scènes de bar comme dans les récits annexes, souvent brillants, parfois dignes de scénarios pour Hollywood – comme cette histoire, au chapitre 6, d’un génial jouer de cartes persévérant à gâcher sa fortune à coups de paris malheureux sur les champs de course.

« C’est à ce moment-là que se produit un premier glissement anormal (mais prévisible : un enfant, presque un bébé, qui se passionne ardemment et exclusivement pour les jeux de cartes à peine son doudou mis de côté, a forcément un problème – il y a toutes sortes de problèmes, graves ou bénins, utiles ou nuisibles, mais quel qu’il soit, il en a un, c’est clair comme deux et trois ne font pas quatre) : il donne mille dollars à ses parents, bon fils, et, mauvais garçon, joue et perd les neuf mille autres en une semaine sur un champ de courses. C’est moche, à quinze ans. » (page 79)

Le roman s’achève par un réjouissant bouquet final de comique pornographique, démentant l’assertion de narrateur au chapitre 5 : « La mesure est le secret de l’élégance littéraire ». Prostituée vieillissante, amant vicelard et déboires sexuels viennent clore un roman dont la morale pourrait être : « Rentrez vite à la maison, piteux hommes vieillissants… »

Trois questions à l'auteur.

1) Philippe, le narrateur semble très proche de toi… Le terme t’agacera sans doute, mais penses-tu pratiquer une forme d’autofiction – un fond de faits réels à partir desquels broder des choses plus fantaisistes ?

Le terme ne m’agace pas du tout, c’est l’interprétation qu’on lui a donnée qui ne me plaît pas. Dans le langage courant, c’est devenu quasiment péjoratif et ça désigne, pour simplifier, « un auteur qui raconte sa vie » (sous-entendu : surtout ses mycoses entre les orteils et sa souffrance quand il a été accusé à tort d’avoir lancé un chewing-gum dans le dos du prof de maths). Mais l’autofiction, c’est de la fiction à partir de soi, de sa vie, non ? Donc c’est à peu près exactement ce que je fais (du moins jusqu’à maintenant – je vais changer, là, je n’ai plus rien à raconter, j’ai à peu près la vie d’une méduse) : je me sers de choses que j’ai vécues (ou qu’ont vécues des proches, ou que j’ai entendues – je rapine un peu partout autour) comme d’une sorte de charpente, de moelle, et ensuite je modifie, je brode, je transforme, je compose et tout le toutim. Un peu comme quand on fait fondre les bijoux de sa grand-mère pour en faire un bracelet, disons.

2) Le bar est un lieu privilégié de tes romans. T’inscris-tu dans une certaine tradition littéraire, celle qui, par exemple de Blondin à Bukowski, met en scène des buveurs et leur confère une certaine force subversive ?

Oui. Bon, d’abord, le bar est un lieu privilégié de mes romans parce que j’y passe à peu près tout mon temps libre. Pour te donner une idée : dans une journée, je reste environ vingt-et-une heures chez moi et trois au bar en bas (quand je te disais que j’avais une vie de méduse). Et puis le bar a quand même deux avantages appréciables. D’abord, c’est un des rares endroits où des gens qui ne se connaissent pas ou peu, dont toi (moi, je veux dire), se côtoient et discutent, entre eux ou pas – ce qui permet de leur parler, ou même simplement, l’air de rien, à la fourbe, de les écouter. C’est tout de même plus simple que d’aller sonner chez quelqu’un qu’on ne connaît pas en demandant si on peut s’installer dans un coin du salon, promis je ne vous dérangerai pas. L’autre avantage, bien sûr, c’est l’alcool. « In vino veritas », je ne suis pas sûr du tout, mais l’alcool, s’il n’est pas révélateur, et au moins désinhibeur, accélérateur, dynamiseur – source d’action. Dans La femme et l’ours, par exemple, si le narrateur n’avait pas fait de nombreux passages dans les bars au cours de son petit périple (comme une voiture de course fait des arrêts au stand), il n’aurait pas été propulsé de déboire en déboire (c’est intéressant, d’ailleurs, l’étymologie de ce mot), de maladresse en mésaventure, de Paris à Monaco, il serait rentré chez lui dès le lendemain matin.

3) Portes-tu sur ta carrière le même regard que Bix, ton personnage, sur la sienne ?

A peu près. Pas tout à fait. (On rejoint ce truc d’autofiction.) Je fais le même constat que lui (on se donne beaucoup de mal pour presque rien), comme lui j’aimerais avoir dix fois plus de lecteurs (mais je connais des tas d’auteurs dépités ou frustrés, perplexes et impuissants, pour ne pas dire tous : quand on a 3 000 lecteurs on se dit que ceux qui en ont 10 000 ont bien de la chance, quand on en a 40 000 on ne comprend pas pourquoi d’autres en ont 100 000, quand on est Houellebecq on est jaloux de Bret Easton Ellis – et quand on vend un million d’exemplaires on aimerait bien être aussi estimé par le « milieu », ou par ses amis, que celui qui en vend 3 000), je patauge comme lui mais ça ne m’abat pas, ne me décourage pas (je suis fort), ne me pousse pas au désespoir – du tout. Je continue à écrire et voilà. Si l’autofiction était ce qu’on entend par là, il n’aurait pas été si déprimé, il ne serait pas parti en sucette, il serait, là aussi, rentré chez lui dès le lendemain matin. Je suis rentré plein de fois chez moi dès le lendemain matin, ça ne fait pas un livre. Or l’important, c’est le livre, quand même, non ?

samedi 15 septembre 2012

Approcher le mystère - entretien express avec Philippe Le Guillou pour "L'intimité de la rivière"



Petit chef-d’œuvre que ce livre de Philippe Le Guillou, L’intimité de la rivière (Gallimard, 2010), quintessence me semble-t-il de son travail de romancier. Il entreprend de décrire ici la rivière finistérienne qui l’a fait rêver, enfant, et dont les sortilèges n’ont cessé de croître.

« L’amont de la rivière (…) m’attirait comme un mystère impénétrable, la clé même de ce territoire, quelque chose qui avait partie liée avec la nuit, l’enfer, les mondes inaccessibles. »

Il ne s’agit pas ici de géologie mais de mythe, de sentiment religieux, de tendresse et d’exaltation devant la beauté des lieux. D’une certaine manière, et sans vouloir faire d’analogie politique, la Bretagne de Philippe Le Guillou ressemble à la Lorraine de Barrès : intime intrication de légendes païennes et de mysticisme chrétien, noces de la terre et de brumes rêveuses…

« Là est sans doute la singularité de mon ancrage chrétien puisque c’est dans le beau baptistère de pierre ocre, à la cuve décorée de cerfs et de lions, qu’un jour d’août 1959, sous le regard de mon grand-père maternel, ce veilleur taciturne, j’ai reçu le sacrement du baptême. C’est là une variété rare et forte de l’ondoiement, sous les étoiles d’or, entre l’autel à l’époque surmonté d’un baldaquin digne de la Contre-Réforme et la porte des mots… »

Le Guillou dit avoir écrit son texte rapidement, mais il est d’une étonnante densité. Beaucoup de mots rares dans des phrases sonores et ciselées, pas un paragraphe négligé dans cette prose qui n’a rien à envier à celle de Gracq – Le Guillou ne cache d’ailleurs pas son admiration pour l’auteur du Rivage des Syrtes.

Le lecteur devine d’autres clins d’œil littéraires, que l’auteur va jusqu’à souligner, par exemple à Proust et à son amour pour les « Noms de pays » : « Parce qu’il y a une forêt en amont de la rivière, et pas n’importe laquelle, la forêt du Cranou, au nom profond, épais, qui concentre en ses sonorités minérales et végétales un fragment noir du mystère breton… » (page 18)

A Ponge, aussi, ou à Breton (quel heureux hasard que ce nom, décidément) : « Oui, une force, à cet instant, me tire du côté du large, à l’ouverture de l’échancrure, un aimant inverse qui me trouble et me déchire, me halant vers, sans doute, ce que j’aime moins, c’est-à-dire un paysage trop ouvert, la domination marine, la circulation du vent, le roulement des eaux qui emportèrent la pauvre Annonciat… »

Le Guillou décrit ici son paradis – le paradis de son enfance et de son imaginaire. Dressant l’inventaire des fascinations qui l’auront toujours guidé, il fait l’économie de la fiction pour dépeindre ses aspirations les plus secrètes. Dès les premières pages, j’ai senti que ce livre serait mon préféré dans sa bibliographie. Et je sais qu’il m’accompagnera longtemps dans mes promenades en littérature et géographie françaises…
« Tout concourrait à me faire entrer dans une sorte de mémoire vive et chamarrée du christianisme » (page 47)

Trois questions à l'auteur :

1) Que penses-tu de l'oeuvre de Barrès et penses-tu lui être proche ?

La terre, les morts... Je ne suis pas insensible, en effet, à une poétique de l'enracinement. Non, Barrès n'appartient pas au nombre de mes "préférences" littéraires, mais j'aime beaucoup son texte sur Le Greco et Tolède.

2) Quel est celui de tes livres auquel tu es le plus attaché et pourquoi ?

Difficile à moi de le dire. Les textes autobiographiques sans doute, Le passage de l'Aulne, Les marées du Faou, Fleurs de tempête, mais l'autre versant de mon travail, essentiellement romanesque, compte beaucoup, et là je songe aux Sept noms du peintre, au Dieu noir et à sa continuation publiée ce printemps 2012, Le pont des anges...

3) Comment définirais-tu ton écriture ?

Poétique, soucieuse de la langue, de sa musique et de ses effets. Résolument ancrée aussi dans le territoire romanesque, dans son filon initiatique et mythique.

4) Quel regard portes-tu sur "L'intimité de la rivière", deux ans après sa publication ?

C'est un livre qui est venu alors que je ne l'attendais pas, qui a surgi au printemps 2010, et que j'ai écrit en très peu de jours. Il sourd de l'enfance, de la mémoire. C'est une cartographie de mon territoire natal, entre le port du Faou et la forêt du Cranou, un des lieux qui m'inspire le plus.

samedi 8 septembre 2012

Cultiver l'indifférence - entretien express avec Solange Bied-Charreton pour "Enjoy"



Le premier roman de Solange Bied-Charreton, Enjoy (Stock, 2012), se présente comme une belle satire de la net generation et des comportements pathologiques découlant d’une fréquentation assidue des réseaux sociaux.

Mais j’y vois bien plutôt le portrait, tout en mélancolie, tout en retenue, tout en douceur, d’une génération désabusée, cultivant une savante indifférence pour le monde.

Par exemple, ce portrait touchant du père du narrateur en homme n’ayant pas profité de la vague d’euphorie des Trente Glorieuses :

« Mon père avait avalé ces décennies de travers, et celles d’après, de force. On ne s’expliquera pas, par ces lignes, les causes de sa rigidité, on s’échinera uniquement à exposer le contexte euphorique et la réaction contre-euphorique qu’il développa. Des Trente Glorieuses, il avait gardé les dents serrées, comme après un divorce ou le suicide d’un ami. Un antibiotique gobé de force, une pilule contraceptive rendant impossible la régénération des rêves, quelques joies avortées, des cigarettes jamais achetées, jamais fumées, jamais consumées dans le cendrier que lui avait offert sa fille en maternelle à l’occasion de la fête des Pères dans les années 80 » (Page 40)

Ou encore, l’évocation du contexte social actuel, marqué par le désenchantement, notamment chez tous ceux qui espéraient trouver un sens dans la vie professionnelle – éditeurs, écrivains, professeurs…

« Les journalistes ne réussiraient pas tous. Les places seraient chères et le talent rare ; on souhaiterait qu’ils écrivissent pour informer ; cela serait rapide, enjoué, mais pas analytique. Certains, reporters en province pour la télé régionale, seraient heureux de chroniquer des chiens écrasés. (…) Les enseignants, quant à eux, constitueraient groupés les statistiques navrantes d’une perte de romantisme éperdu. Armés du maigre prestige de la réussite au concours, ils tenteraient avant tout d’embrasser le confort. (…) Leurs élèves ne sauraient pas parler le français et ils étudieraient pourtant L’île des esclaves de Marivaux en seconde générale. » (page 174).

Le roman se clôt sur un élégant constat d’indifférence vis-à-vis du monde, sans doute accentué par la consommation névrotique d’images et de virtualités, mais qui me semble trouver ses racines dans un mal-être plus profond, lié à l’époque toute entière :

« Je n’ai pas vieilli. J’ai assiste au théâtre du monde sans parvenir à m’en dégoûter pleinement, l’enfer comme le paradis tenus à distance. Je n’ai pas réussi à me détruire comme je le voulais, à ne plus aimer la vie ou à l’aimer intensément. Cette fièvre je l’aurais désirée de mon sang. Cet amour ou cette haine, je ne les possédais pas. »

Trois questions à l'auteur :

1) Quelle description ferais-tu de ta génération ?

Je n’en ferais pas une mais plusieurs, je ne parviens pas à trouver d’unité entre ses membres. Nous n’avons ni les mêmes rêves ni les mêmes regrets. Il y a des castes, sans doute. Des efficaces pragmatiques, des paumés retardés romantiques. Notre point commun ? On télécharge de la musique et on se fait des playlists qu’on écoute dans le métro, on a un compte Facebook... Cela suffit-il pour autant à nous caractériser ? Ce serait si simple ! Dans Enjoy, j’ai fait une description assez négative de ma génération. Il m’a fallu noircir le tableau pour en sortir quelque chose tout à la fois comique et triste. J’ai décrit une génération de jeunes gens ennuyés (ennuyés par leur boulot, ennuyés par leurs loisirs), avec des repères familiaux incertains. C’est souvent ainsi que je nous vois. Le personnage principal, par exemple, est à la fois fasciné et effrayé par son père … et un jour tout s’effondre, ce malheureux devient fou et part à l’asile. Il y a une perte de direction globale que je voulais décrire (pour le dire précisément : perte de repères familiaux, perte du sentiment d’utilité au travail, avec des relations et des loisirs de plus en plus virtuels).

2) Quel rapport est-ce que tu entretiens avec le monde du web ?

J’entretiens de bons rapports avec ce petit monde ! Mais ce sont des rapports de plus en plus lointains. Blogueuse durant cinq ans, j’en ai été une exploratrice à mon échelle, une flâneuse sans répit. Aujourd’hui je me tiens en retrait mais l’intérêt reste le même, j’ai conscience de la force du média, du pouvoir viral des liens, de l’influence que peuvent avoir des blogs fréquentés, des réseaux sociaux. Je suis pour ma part retirée du jeu mais je ne néglige rien de ce qui se passe sur la Toile. Je lis beaucoup la presse sur le web, je lis des blogs (le blog de Pierre Assouline, le blog littéraire de l’Obs, par exemple) et j’utilise Facebook (contrairement à ce que certaines personnes ont cru après avoir lu Enjoy, j’aime Facebook !).

3) Pourrais-tu nous citer quelques auteurs dont tu penses qu'ils proposent une vision intéressante du web ?

Je vais avoir un peu de mal à répondre à la question, car je ne lis pas beaucoup d’auteurs qui évoquent Internet. Je garde tout de même en mémoire La Grande Intrigue (Stock, 2005-2010), de François Taillandier, avec l’épisode de la « Web Mamy », une grand-mère qui ouvre un site internet sur lequel elle raconte tout des membres de sa lignée. Cela part d’un bon sentiment et ça finit par exaspérer tout le monde dans la famille ! Ce tome de La Grande Intrigue (Telling) est sorti je crois avant l’explosion de Facebook mais on trouve déjà en germes, dans le chapitre de la « Web Mamy », ses travers principaux : exhibitionnisme et voyeurisme. Pour le reste, il y a récemment La Théorie de l’information d’Aurélien Bellanger (Gallimard, 2012), dont l’ambition documentaire impressionne justement à propos d’Internet, des raisons de son succès, de sa destinée économique, de la manière dont le réseau écrit l’histoire des hommes depuis une trentaine d’années. Cette entreprise m’a paru intéressante et à la date d’aujourd’hui une quasi nécessité. Continuons ainsi de courir les champs (magnétiques) : la « vraie vie » est partout, y compris ailleurs.

samedi 1 septembre 2012

Entretien express avec Carole Fives pour "Que nos vies aient l'air d'un film parfait"



Le premier roman de Carole Fives, Que nos vies aient l'air d'un film parfait (Le Passage, août 2012), est un livre déchirant. L’histoire est terrible : un couple divorce et décide de répartir les gardes. La fille restera chez le père, le fils chez la mère. Et le partage serait déjà cruel sans le détail qui scelle la tragédie : la mère, bipolaire, sans doute déjà responsable de l’échec du couple, fera peser sur le fils tout le poids de sa rancœur et de son instabilité. S’en suivront, chez les protagonistes, douleurs et mauvaise conscience.

« Après il y a encore eu des moments bien sûr, des petits bouts d’enfance ça et là, mais rien n’a plus été pareil. » (Page 17)

L’habile distribution des voix narratives accentue l’émotion : trois personnes prennent tour à tour la parole, le père, la mère et la fille qui s’adresse à son frère en utilisant un « tu » cherchant à retranscrire ce qu’il éprouve :

« Le père a commencé, « Nous avons quelque chose à vous annoncer ». (…) D’habitude, les parents ont rarement l’occasion de se confier à toi comme ce matin. C’est une famille qui déjà n’en est plus une et où il n’y plus grand-chose à se dire. A moins que ce ne soit une famille où il y ait tellement de choses à dire que plus aucun mot n’en sorte. Comme quand la bouche est tellement pleine que si on l’entrouvre, ce n’est pas un mot qui arrive, pas un tout petit mot, mais tout un tas de mots emmêlés, qui à la fin forment un bruit étrange, à peine un cri. » (Page 11-12).

La voix de la principale victime, elle, brillera par son absence, jusqu’aux dernières pages du livre où l’on découvre une lettre affectueuse du frère à sa sœur, parti vivre sur les routes de Roumanie.

« Il paraît qu’il y a pire petit frère, il paraît qu’il y a des familles où l’on ne divorce pas alors qu’il vaudrait mieux. Ce n’est pas à toi qu’il faut raconter ça, ce n’est pas le genre de pilule que tu vas avaler si facilement, pourtant ce sont des gens concernés qui le disent, des enfants de couples non divorcés non séparés qui disent « tout plutôt que la lente montée de la haine, pire, de l’indifférence, tout plutôt que le statu quo, et si vous croyez qu’on apprend l’amour dans une famille où il n’y en a pas. » » (page 45)

Une pudeur, une qualité d’écriture, une économie de moyens qui font penser à Olivier Adam si ce n’est que la fiction, réduite à la plus simple expression, s’approche autant que possible d’une expérience que l’on devine très sensible.

Entretien rapide avec l’auteur :

- Une question que je devrais me retenir de poser : Quelle est la part de vécu dans ce livre qualifié de roman ?

Rien n’est vécu, tout est vécu. Rien n’est vrai, tout est vrai. Le réel n’est qu’un prétexte pour la fiction, comme je crois dans tous les romans.

- En tête du chapitre III, tu places en exergue une citation de Charles Juliet. Un commentaire ?

De Charles Juliet, je ne connais pas le journal, mais surtout la poésie. La poésie permet d’aller dans des endroits que ne permet pas le roman. La poésie n’est pas prisonnière du visible comme le roman, et ce poème en exergue, annonce le parcours du frère, dans l’ultime partie du roman.

Tu ne me demande pas pourquoi j’ai mis Laurent Mauvignier en exergue de la deuxième partie, mais je te le dis tout de même, c’est en reposant le livre de Laurent Mauvignier, Ce que j’appelle oubli, que j’ai immédiatement entamé l’écriture de Que nos vies aient l’air d’un film parfait. J’ai beaucoup pensé aussi à Loin d’eux, du même Mauvignier, en l’écrivant.

- Trois auteurs dont tu rêverais d’avoir écrit les livres, et pourquoi ?

« Tu ne t’aimes pas », de Nathalie Sarraute, parce que tout est dit, tout est vu, perçu, comment écrire après Sarraute ?
« Eau sauvage », de Valérie Mréjen, parce qu’elle a inventé une langue, et ce n’est pas si fréquent.
« Mauvaise journée, demain », de Dorothy Parker, pour son humour et sa lucidité.

lundi 7 mai 2012

Entretien express avec Carole Zalberg



Suzan, américaine, se rend à l’enterrement d’une femme que son père a aimée lors de la libération de Paris. Deux voix se mêlent alors pour déployer l’histoire de deux familles juives essaimant à partir de la Pologne vers la France, les Etats-Unis, l’Afrique du Sud en fonction des terribles aléas politiques du 20ème siècle.

Ce beau roman de Carole Zalberg, A défaut d’Amérique (Actes Sud, 2012), construit par courts chapitres comme autant de monologues à la fois précisément romanesques et lyriques, offre d’émouvantes scènes de famille et de puissants croquis de ressentis politiques, comme dans cet extrait du dernier chapitre, lorsque Suzan évoque son rapport à Israël – pays dans lequel elle choisira finalement de ne pas aller vivre :

« Elle entretient avec Israël un rapport ambigu, douloureux, même, a toujours évité d’en discuter y compris, dans la mesure du possible, avec ses parents. Elle a souvent envié leurs convictions, cette position solide des persécutés qui consiste à s’estimer dans son droit, à justifier, du coup, tous les moyens, et de bonne foi. Il lui est arrivé de leur demander pourquoi ils n’avaient jamais souhaité émigrer vers cette terre qu’ils considéraient comme leur. Leur intérêt ? Ici, c’est Israël sans les guerres, plaisantait son père. Ce qui, au fond, choquait Suzan, la mettait mal à l’aise. Elle trouvait vaguement malhonnête de défendre, au nom d’un peuple auquel on dit appartenir, la nécessité et la légitimité d’un pays où on n’a pas le cran d’aller vivre. Alors elle se taisait. Et pourtant le lien est là, qui se réveille dès qu’il est question de l’Etat juif dans les médias ou les conversations. Tout ce qu’elle éprouve à ce sujet, fierté, honte, découragement ou colère forme un brouet indigeste, une vase au fond de sa conscience. » (A défaut d’Amérique, page 209)

Trois questions rapides à l’auteur :

Quelle est la part biographique, la part fantasmée dans l'histoire de ces quelques familles ?

Disons que je suis partie de la part totalement fantasmée, inventée, bâtie, pour arriver, assez naturellement à la part plus autobiographique. C’est comme si l’écriture d’“A défaut d’Amérique” m’avait irrésistiblement entraînée sur les traces de ma propre histoire familiale. Par ailleurs, il y a un certain nombre de femmes marquantes dans mon entourage ou ma lignée et je crois qu’elles imprègnent, parfois à mon insu, mon imaginaire.

Quels sont les écrivains auxquels tu as éventuellement pensé en écrivant ce roman ?

Aucun en particulier. Jamais, en écrivant, en fait. Mais bien sûr je suis forgée, en tant que personne et en tant qu’écrivain, par mes lectures. Et comme celles-ci sont très éclectiques, il est difficile de déterminer quel écrivain en particulier influence quel texte. “A défaut d’Amérique” penche sans doute plus du côté de mes lectures sud-américaines, américaines ou russes que françaises. Et encore, c’est vrai pour le côté fresque, pour l’onirisme et un certain lyrisme assumé, mais pas pour la phrase qu’à aucun moment je n’ai voulu lâcher au profit du récit.

Que peux-tu me dire sur la structure particulière du roman, fondée sur une série de courts chapitres ?

Cette construction s’est imposée très vite. Le roman s’est vraiment écrit comme ça, dans cette succession de chapitres brefs, oui, qui étaient pour moi comme des marches. Chaque chapitre enclenchait en quelque sorte le suivant et ainsi jusqu’au bout, jusqu’à l’apaisement et l’horizontalité finale.

Merci Carole !