Très belle exposition Odilon Redon au Grand Palais. J'ai toujours été séduit par la grande originalité des thèmes qu'il traitait - cette façon de fouiller son propre imaginaire, de partir à la recherche d'images fondamentales, de présenter la matière de ses rêves, sans craindre de paraître étrange ou inquiétant.

Le curieux syncrétisme qui est le sien, aussi, mêlant les symboles de plusieurs religions, les mythes de plusieurs civilisations.

Puis sa conversion à la couleur, Redon renonçant en partie au monde des rêves le temps de quelques oeuvres plus décoratives (encore que ses fleurs soient souvent purement imaginaires), adoptant une palette de couleurs vives, chaudes et contrastées proche de celle de Gaughin, à qui il rend hommage dans plusieurs toiles.



J'ai ressenti face à ses toiles la même chose qu'avec quelques autres artistes : l'envie d'écrire une sorte d'équivalent littéraire aux oeuvres que j'ai devant les yeux. Qu'est-ce que cela pourrait donner, dans le cas de Rodon ? Des poèmes dans la veine de Baudelaire, bien sûr, ou Mallarmé. Plus difficile de concevoir une fiction... Peut-être des nouvelles du style de Hoffmann, angoissantes et fantastiques ? Une prose "artiste" à la manière de Huysmans (qui admirait Rodon, d'ailleurs) ? Une écriture puissante et raffinée comme celle de Poe ?

Je n'ai jamais rien écrit qui puisse me faire penser moi-même à Rodon. Il faudrait quelque chose de somptueusement contemplatif... Très difficile de ne pas être ennuyeux quand on est contemplatif, tout en ayant l'ambition d'une prose riche et maîtrisée. Gracq, peut-être, à cet égard, pourrait-il être un digne équivalent de Rodon ?